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Presque la fin du monde...

Lecture du dernier livre d’Adrien Candiard

vendredi 21 octobre 2022

Exquise dissertation sur la fin du monde. Choquant me direz-vous ? Non, la question est vraiment traitée avec le plus grand sérieux. Avec le dérèglement climatique, la guerre en Ukraine et sa possible dérive nucléaire, la question de la fin du monde, ou d’une fin du monde est d’actualité. Et ce serait absolument vain que de refuser les questions posées par cette apocalypse possible.

Du chapitre 13 de l’évangile de Marc

Adrien Candiard va donc s’appuyer essentiellement sur l’évangile de Marc pour nous proposer une réflexion eschatologique, c’est à dire une réflexion théologique sur la fin des temps. Au chapitre treize de cet évangile, Jésus, se sentant sur le point d’être trahi et arrêté, fait un long discours sur la destruction du temple, les persécutions à venir de ses disciples et sur son retour à la fin des temps. C’est à la fois une description très évocatrice d’une fin du monde pour les chrétiens, mais également une prophétie assez floue que beaucoup ont vu se réaliser à différentes époques que cite l’auteur (destruction effective du temple de Jérusalem par les romains en l’an 70, chute de Rome, peste noire en Europe, tremblement de terre de Lisbonne à l’époque des lumières).

La question du mal

Mais très vite Adrien Candiard aborde la question de fond : le mal semble toujours ressurgir, et toujours capable de vaincre les meilleurs efforts des humains pour contribuer à un monde meilleur, à une civilisation de l’amour. Oui l’amour n’est pas aimé, et c’est bien le message fondamental du texte de Marc : Jésus qui incarne l’amour infini de Dieu sera finalement crucifié. A travers l’épisode de l’homme possédé par une légion de démons que Jésus lâche sur un troupeau de porcs qui vont se jeter à la mer, dans un élan « dérisoire et grotesque », Adrien Candiard mène une belle réflexion sur le sens de cette parabole. Oui Jésus révèle quelque chose en envoyant les démons sur les porcs. Il révèle le dérèglement profond que peut causer le mal au cœur de notre monde. « …cette fois Jésus nous révèle la nature du mal. Déployé dans ces porcs, le fruit du péché apparaît dans son enchainement implacable, qui pousse celui qui s’y abandonne jusqu’au saut absurde dans le vide. » C’est éclairant car, aujourd’hui, le spectacle du monde, c’est bien le troupeau de porcs « possédés » qui se jette dans le vide !

Les signes des temps

Adrien Candiard le rappelle, il n’y a pas de signe prophétique à décrypter pour identifier si aujourd’hui ou non <> (il reçoit de tels messages après certaines de ses interventions publiques), ce que révèle Jésus dans l’évangile de Marc, c’est que l’important c’est l’amour. L’enjeu eschatologique, même dans un théâtre d’opération planétaire, même dans le décor grandiose d’une apocalypse à grande échelle, l’enjeu donc est dans le sens étymologique du mot apocalypse : révélation. Le seul véritable enjeu est la révélation de l’amour infini de Dieu au fond de nos cœurs, et notre conversion à l’amour. Et Adrien Candiard le montre habilement à travers quelques exemples : c’est la seule vérité qui compte. Il n’y a pas de vérité alternative, il n’y a pas de justice divine autre que celle évoquée dans les béatitudes (« Heureux les cœurs purs car ils verront Dieu »). Il faut veiller, rester dans l’espérance, c’est à dire dans la vision de la victoire déjà acquise de Dieu sur le mal, quand bien même tout nous dirait le contraire autour de nous.

Et alors ?

Alors tout ceci peut sembler extrêmement fumeux au lecteur de cette critique, parce que je ne suis pas Adrien Candiard et que je tente de résumer sa belle pensée en quelques lignes alors qu’il la déroule avec talent sur un peu plus de 100 pages. Ce qui importe réellement de dire dans cette critique, c’est que c’est un texte talentueux, qui ne s’écarte pas d’un iota du message principal de l’évangile, qui est "n’ayez pas peur", "convertissez vos cœurs", et "aimez-vous les uns les autres". C’est donc un rappel à l’essentiel que nous propose l’eschatologie chrétienne. Il n’y a pas de recette pour survivre. Il n’y a pas non plus de renoncement. Nous devons œuvrer pour faire un monde meilleur, car c’est ainsi que nous incarnons l’amour qui nous inspire. Je cite : “La mort personnelle est une chose, et la destruction du monde en est une autre. On peut sereinement envisager la première et croire sincèrement en la résurrection, tout en vivant dans l’angoisse de la seconde.” Certains reprocheront à ce texte de ne pas réellement prendre à corps à corps la question de notre fin du monde, de notre écologie en péril, de l’urgence. Mais en réalité, le message est bien là : l’urgence c’est l’amour, l’enjeu c’est l’amour, la méthode c’est l’amour. Et ce n’est pas facile pour autant car "l’amour n’est pas aimé."

La victoire est en nous

Je cite : "La victoire déjà acquise de Dieu et cette création nouvelle qu’il nous promet ne sont nullement des appels à nous désintéresser de ce monde qui passe ou des défis qui sont devant lui. Pas plus que la croyance à la vie éternelle ne pousse les chrétiens au suicide ou à l’indifférence devant la maladie et la souffrance du prochain, la certitude du Royaume de Dieu n’autorise aucune indifférence à l’égard de notre monde, aucun retrait des combats et des engagements pour le préserver."

Oui, c’est un texte lumineux. Oui c’est choquant, mais c’est un choc salutaire et généreux, un rappel à l’essentiel.

P.-S.

Retrouvez d’autres textes dansle magazine Aspir"à plus, le journal de ma vie intérieure dont je suis contributeur...

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