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Pensée du jour

Penser le mal

2022 : la guerre en Ukraine, l’invasion soviétique était une horreur, mais tout aussi horrible de découvrir que des amis à moi pouvaient vouloir la justifier !

Comme l’exprime si bien Susan Niemann dans son ouvrage penser le mal, “Après tout, nous sommes horrifiés, non pas quand des bêtes et des démons se comportent comme des bêtes et des démons, mais quand ce sont des êtres humains qui se comportent ainsi.”

C’est assez facile finalement de diaboliser les russes et Poutine, et de se dire "ils ne sont pas comme nous, ils ont été élevés dans le totalitarisme".

Mais découvrir que certains de nos voisins nient cette boucherie volontairement au nom de leurs idées, au nom de leur méfiance envers nos gouvernants ou envers l’Amérique, découvrir que ces personnes que nous aimons se rendent complices d’une telle extermination saisit l’âme d’effroi. Ces personnes ne sont pas des monstres, et l’horreur de leur comportement n’en est que plus vive.

Le choc éthique est de nature à remettre en cause toute forme d’optimisme sur la nature humaine. Il y a vraiment en nous une volonté de domination brutale qui ne demande qu’à se manifester, et si peu de personnes attachées à la paix. La cause en est-elle psychologique (blessures intimes), métaphysique (se prendre pour Dieu), morale (mauvais exercice de la liberté) ou ontologique (péché originel), la philosophie en a débattu pendant plus de 20 siècles (c’est le thème du livre cité), et n’a pas réussi à en tirer d’explication claire malgré des fulgurances de Rousseau, Nietzsche, Arendt, et j’ajouterais à la liste Spinoza même si c’est plus indirect.

"Un chien né avec 3 têtes ne remet pas en cause notre idée du chien" (même livre) mais un homme commun capable de se rendre complice du mal met à mal notre conception de l’humanité...

Pour finir sur une note positive, nous avons de si beaux exemples d’engagement pour le bien de l’humanité, que nous avons aussi de quoi regarder vers le haut (Greta Thunberg, Desmond Tutu, Gandhi, Mandela, Jésus...), et se dire que la beauté de l’homme est d’être capable de sortir de cette fange dans laquelle il est baigné. Cette conscience du mal, quand elle se réalise, est aussi ce qui nous incite à aller vers le bien. Tout comme la conscience de notre mortalité nous fait soudain vivre l’instant présent.