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Wastburg

le héros, c’est une ville

mardi 9 avril 2013

Si vous pensez qu’il y en a marre de l’éternel schéma de la fantasy où un petit jeunôt porteur d’un don qui le dépasse devient un grand héros au travers d’une série d’épreuves, Wasburg est sans doute fait pour vous.

Si vous pensez qu’il y en a marre de l’éternel schéma de la fantasy où un petit jeunôt porteur d’un don qui le dépasse devient un grand héros au travers d’une série d’épreuves, Wasburg est sans doute fait pour vous.

Car Wastburg, c’est surtout une jolie collection de héros sur le retour, de minables en quête de gloire, et de gagne petit qui survivent à coup de débrouille. Enfin quand je dis qu’ils survivent, c’est assez exagéré, car on est bien plus près de l’ équation « un chapitre, c’est un personnage qui succombe à sa propre sottise ».

Pas de héros donc dans Wastburg, et le fil conducteur c’est la garde de la ville. Le lecteur découvre tous les petits métiers d’une ville médiévale qui était assez bien policée avant la déglingue, c’est-à-dire lorsque des magiciens aidaient à gouverner la ville, mais qui apprend à survivre aux voleurs, aux pilleurs de tombes, aux contrebandiers, aux escrocs, aux politiciens corrompus maintenant que l’on ne peut plus s’en remettre à aucune force supérieure. Au-delà du cruel darwinisme urbain, il y a une vie communautaire qui se construit sur ce tas de fumier.

Wastburg, c’est aussi un puzzle étonnant, puisqu’au travers du fil conducteur de la garde, nous assistons à des événements qui semblent plus tenir de la rubrique des chiens écrasés que de la quête épique. Mais chacun de ces gardoches assiste à un fait divers qui nous révèle en filigrane de quoi se meurt la ville, ou de quoi elle renaît. Le lecteur découvre Wastburg par l’intérieur et devine peu à peu que le fil conducteur n’est pas celui qu’on croit, mais un autre écheveau, bien plus noueux, qui se déroule jusqu’au feu d’artifice final.

Le personnage principal, c’est donc la ville, et elle seule, au travers du fascinant truchement des gardes de tout poil. La ville a de nombreux visages et elle est en particulier bigarrée puisqu’elle abrite deux peuples frontaliers qui cohabitent sans se comprendre, les rustres Loritains et les fiers Waelmiens, chacun avec ses us et coutumes allant du pittoresque à l’émouvant en passant parfois par l’absurde.

L’originalité de cette trame pourrait suffire à garantir une lecture de qualité, mais ce qui rend ce roman passionnant, c’est bien entendu son style qu’on ne pourrait comparer qu’à celui de l’illustre Jaworski (Gagner la guerre) qui s’est d’ailleurs fendu d’un petit compliment en quatrième de couverture. Là où Jaworski manie un langage riche et truculent, Cédric Ferrand invente un langage cocasse, imaginatif et surprenant. L’argot de la ville s’apprend au fil des pages sans la moindre difficulté, les mots inventés font sourire et participent d’une entrée dans l’intimité de Wastburg et de ses habitants.

C’est l’association de ce kakéidoscope fascinant et de ce langage impliquant le lecteur qui nous entraine avec une telle facilité dans le labyrinthe des rues pour une sacré tranche de vie, pardon de ville.


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