Saint Augustin, docteur de l'Église

Augustin peint par CarpaccioAugustin est né en l'an 354 à Tagaste (près d'Annaba en Algérie actuelle) et mort en 430 à Hippone (Annaba). Son père, Patricius était citoyen romain et païen, sa mère, Monique était chrétienne. Sa famille, modeste fait des sacrifices pour qu'il fasse des études de rhétorique (parler en public). Brillant orateur, il écrira aussi de nombreux livres, ce qui l'amènera, après sa conversion à écrire une réfutation des erreurs de ses écrits passés! Il a une concubine et un enfant (qui se convertira avec lui mais mourra jeune). Il a été beaucoup influencé par la philosophie néo-platonicienne (Plotin) dont il dira plus tard que la recherche du Vrai, du Bien et du Beau est proche du christianisme, mais qu'il lui manque l'incarnation. Il sera aussi pendant 10 ans proche des manichéens dont il combattra la doctrine après sa conversion.

Il enseigne à Rome, puis à Milan. C'est là qu'il rencontre Saint Ambroise qui le marque profondément. Il refuse toujours de devenir chrétien parce que la Bible l'intéresse peu, parce qu'il n'arrive pas à concevoir intellectuellement que Dieu soit pur Esprit, et surtout qu'il ne veut pas abandonner sa vie passée (Il croit que devenir chrétien l'obligerait à renoncer à sa sexualité).

augustin par BoticelliSa mère, Monique prie pour sa conversion pendant près de 10 ans et, finalement, en 386, il entend une voix qui lui dit "prends et lis". Il ouvre la Bible, posée près de lui et y lit une phrase de Saint Paul qui l'interpelle profondément. Il est baptisé par Ambroise. Il va vivre pendant trois ans en communauté avant d'être élu évêque par acclamation populaire. C'était une responsabilité particulièrement écrasante à l'époque : s'occuper des affaires de tous, faire des homélies, siéger au tribunal. Tiraillé entre ses aspirations à méditer en solitaire et son souci de se dévouer aux hommes qui le sollicitent, il comprend combien l'Église est à la fois communion au mystère du Christ et rencontre concrète des hommes dans un ministère de charité.

Saint Augustin a surtout marqué l'histoire de l'Église par ses écrits théologiques qui font encore autorité aujourd'hui (c'est par exemple un des auteurs les plus cités de l'excellent catéchisme de l'Église Catholique). Son livre le plus connu est : les confessions, où il raconte très simplement sa vie et sa conversion, en louant Dieu, et en faisant des commentaires "théologiques". Le plus connu est son commentaire autour d'un vol de poire qu'il fit dans sa jeunesse. Il y montre comment la source du péché est souvent la jalousie de Dieu et le désir de faire le mal pour "décider du bien et du mal" comme seul Dieu peut le faire. Le titre, les confessions, a un double sens : confesser Dieu, le proclamer, et aussi confesser ses erreurs.

Saint Augustin a beaucoup écrit sur la grâce, en raison de son histoire personnelle vis à vis des manichéens et de l'hérésie de Pélage qu'il a combattu. L'homme a besoin de la grâce toute puissante pour être sauvé. Pélage prétendait que l'homme pouvait se sauver par ses seules forces pourvu qu'il fit preuve de beaucoup d'ascétisme. Chez Augustin, il y a la grâce toute puissante au secours de l'homme pécheur, mais néanmoins libre et responsable. L'homme, livré à un conflit intérieur, est souvent victime de son inclination au péché mais il est pardonné par Dieu. Il compare parfois Dieu à un médecin, à un père, ou au pilote d'un navire dans la tempête.

"Nous vous ouvrons notre coeur en vous confessant nos misères, et vos miséricordes pour nous, afin que vous nous délivriez tout à fait puisque vous avez commencé de le faire, et que nous cessions d'être malheureux en nous pour goûter le bonheur en vous." Les confessions livre 11.

Saint Augustin a également combattu l'hérésie des donatistes et a fondé une théologie de l'église en réponse aux donatistes.

La création est bonne (contrairement à la doctrine des manichéens). Le mal, pour Augustin, vient de l'orgueil et de la jalousie qui dressent les hommes contre Dieu :

"J'ai cherché ce qu'est le mal, et j'ai trouvé que ce n'est pas une substance, mais la perversité d'une volonté qui se détourne de la souveraine substance (de vous, mon Dieu) pour se jeter dans les choses basses et qui projette ses entrailles (Si 10,9) et se gonfle au dehors" Les confessions livre 7.

"car le Dieu tout puissant (...) puisqu'il est souverainement bon, ne laisserait jamais un mal quelconque exister dans ses oeuvres s'il n'était assez puissant et bon pour faire sortir le bien du mal lui-même."

"l'homme ne peut, tant qu'il est dans la chair, éviter tout péché, du moins les péchés légers. Mais, ces péchés que nous disons légers, ne les tiens pas pour anodins : si tu les tiens pour anodins quand tu les pèses, tremble quand tu les comptes. Nombre d'objets légers font une grande masse ; nombre de gouttes emplissent un fleuve ; nombre de grains font un monceau. Quelle est alors notre espérance? Avant tout la confession..." Épître à Jean

"Notre coeur est sans repos tant qu'il demeure loin de vous" Les confessions

Saint Augustin a consacré un gros traité à la Trinité. Il pense que la connaissance de la Trinité est essentielle, et aussi nécessaire pour comprendre l'homme. Dieu est aussi "l'Éternel intérieur".

Saint Augustin va être contemporain de la décomposition de l'Empire Romain et notamment de la prise de Rome par les barbares (en 410, par Alaric, roi des Goths). Cet événement incroyable, impensable va semer la panique dans tout l'empire romain. Les chrétiens notamment se posent la question : "Comment se fait-il que Rome tombe alors qu'elle vient de se convertir au christianisme (sous l'empereur Constantin) ?" Il est incompréhensible que Dieu la laisse tomber à ce moment. N'étaient-ce pas les dieux anciens qui protégeaient Rome? Cette question va inspirer un livre à St Augustin : la cité de Dieu. A l'opposé de la cité céleste (le royaume de Dieu, déjà en germe), les cités terrestres (Rome et toutes nos constructions) sont appelées à disparaître. Il faut donc vivre et espérer en fonction de la cité céleste. la vie terrestre est le noviciat de l'éternité.

"Deux amours ont fait deux cités : l'amour de soi jusqu'au mépris de Dieu, la cité terrestre, l'amour de Dieu jusqu'au mépris de soi, la cité céleste." La cité de Dieu, livre 14.

Pour terminer, disons que beaucoup voient Augustin comme pessimiste parce qu'il parle du péché (racheté) de l'homme, c'est oublier toutes ses pages sur le bonheur de voir Dieu, et la "douceur" de le connaître :

"Votre douceur dépasse toutes les séductions que je suivais" Les confessions, livre 1.